Sabatier de Castres a consacré dans Les
Trois Siècles de la littérature française une
notice à Voisenon, de qui Plein Chant a publié,
attribués à Voisenon, Les Exercices
de dévotion de M. Henri Roch avec Madame la
duchesse de Condor, par feu l'abbé Voisenon, de
joyeuse mémoire et de son vivant membre de l'Académie
française. Voici des passages de la notice,
extraits du quatrième tome de la quatrième édition
des Trois Siècles… (La Haye et se trouve à
Paris, 1779), p. 214 et suivantes.
VOISENON, [Claude-Henri de
FUSÉE de]
Doyen du Chapitre de Boulogne-sur-Mer,
Ministre du Prince Evêque de Spire à la Cour
de France,
de l’Académie Françoise,
mort en 1775.
Ceux
qui aiment l’esprit, les graces, la
finesse & la gaieté, trouveront ces
heureuses qualités éminemment reconnues
dans presque toutes les Productions de cet
Académicien. La connoissance du monde, la
facilité à en saisir les ridicules, l'art
plus piquant encore de les peindre
agréablementdonnent à ses Romans
un caractère qui les distingue de ces
Productions frivoles, chargées d'aventures
& de sentimens parasites, rebattues
cent fois, & toujours exprimées d'une
manière insipide ou bisarre. Au moins
apprend-on quelque chose dans ceux de M.
l'Abbé de Voisenon. L’Histoire de la
Félicité, entre
autres, est un Ouvrage où l'imagination,
les traits ingénieux, les portraits
originaux, les pensées saillantes,
fourmillent & amusent le Lecteur, en
l’intéressant. On y voit un tableau de
la Société , aussi vif que juste,
finement dessiné, & capable de
guérir les ridicules, si les ridicules
n’étoient encore plus difficiles à
vaincre, que les vices. (…)
M. de
Voltaire appelle l'Abbé de Voisenon un
des Conservateurs de la gaieté Françoise ; il
auroit pu ajouter qu'il est également
Conservateur du goût. En effet, en
sacrifiant à l'esprit,il
n'a jamais méconnu les règles ; il
leur a même rendu hommage dans plusieurs
endroits de ses Ouvrages, où il reproche
au Siècle avec autant d'agrément que de
vérité, les caprices qui le dégoûtent
des bonnes choses, pour le faire courir
après les Productions médiocres &
puériles. (…)
Cet
Auteur a conservé sa gaieté jusqu’au
dernier moment de sa vie. Il avoit fait
faire d'avance un cercueil de plomb ;
il se le fit apporter quelques jours avant
sa mort : Voilà donc ma dernière
redingote, dit-il en se tournant vers un
de ses laquais, dont il avoit eu
quelquefois à se plaindre : J’espere, ajouta-t-il,
qu'il ne te prendra pas envie de
me voler celle-là.