Les Dévotions
de Mme de Bethzamooth
suivi de
La Retraite. Les
tentations et les confessions de la marquise de
Montcornillon Bassac Plein Chant, 1993
Bibliothèque facétieuse, libertine & merveilleuse. Extrait pp. 5-6. |
Les Dévotions de Madame de Bethzamooth et les pieuses facéties de Monsieur de Saint-Ognon |
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Veut-on rendre une femme raisonnable ? Il
faut coucher avec elle. — Veut-on rendre un homme
heureux et content ? Il faut le faire cocu. —
C'est tout le sujet de l'histoire que nous allons
raconter. Madame de Bethzamooth sortait de l'église
St-Sulpice, fort édifiée d'un sermon qu'avait prêché
M. l'abbé Du Trognon, lequel avait embrassé le métier
de prédicateur sur ce que M. Du Trognon son père et
Mme Du Trognon sa mère lui avaient dit que la chaire
pourrait le mener à un évêché […] En entrant dans son carrosse, Mme de
Bethzamooth aperçut au milieu de la rue, et dans les
boues, exposé au froid et à la neige, M. de St-Ognon.
C'était un beau jeune homme, d'un visage modeste et
intéressant ; il était arrêté par un embarras de
voitures, si grande était ce jour-là la presse à la
foire, à la comédie française et à l'église
St-Sulpice. Ce n'est pas trop l'usage de ramasser dans la
rue une personne qu'on ne connaît pas : mais
lorsqu'il s'agit d'une bonne œuvre, la dévotion ne
regarde pas de si près. D'ailleurs, Mme de Bethzamooth
crut reconnaître M. de St-Ognon, elle le prit pour M.
Henri Roch, dont elle avait entendu parler comme d'un
grand dévôt, qu'elle avait vu à l'assemblée des
saints, et qu'elle désirait connaître
particulièrement. — Je souffre beaucoup, Monsieur, lui dit-elle,
de vous voir en danger d'être écrasé par les voitures.
Entrez dans la mienne, et je vous mènerai à votre
choix, ou chez vous, ou à mon hôtel. […] |