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La peine de mort et la guillotine sont en ce
moment
suspendues. Mais le peuple réclame le retour aux
belles cérémonies d'antan. Qui
oserait s'opposer au peuple sans qui l'on n'est
ni n'a rien ? Fortes sont
donc les chances d'un rétablissement des bois de
justice et des exécutions
publiques, type 1880-1914, devant une foule où
se mêlent et jouissent ensemble
banquiers, industriels, femmes du monde, stars
de cinéma, boutiquiers, jeunes
cadres battants, O.S., employés de bureau des
deux sexes, femmes de ménage de
tous pays (unissez-vous), etc. et les enfants
des écoles symbolisant ce
rassemblement national tant prôné et ici
pleinement réussi et justifié car sans
cette foule à quoi et à qui pourrait donc bien
servir l'Exemple de la
décapitation légale et moderniste d'un être
humain ?
En prévision de ce retour aux
méthodes éprouvées, nous
suggérons de compléter les programmes scolaires
d'un cours de guillotine. Il
est bon que, très jeunes (à partir de la
maternelle, à notre avis), nos enfants
comprennent son mécanisme et soient en mesure un
peu plus tard (dès maintenant
pour ceux qui aiment, et ils sont nombreux, les
sensations fortes) de le mettre
en pratique aisément sur leur cou individuel. De
toute façon, l'État se
déchargerait d'une tâche qui – pas plus que les
autres – n'est de son ressort.
Son rôle se limiterait à l'entretien des
machines et à leur location aux
familles, en attendant qu'une société privée
prenne en main cette entreprise et
récupère, avec intérêts et accessoires, et un
bénéfice raisonnablement élevé,
sur les conjoints, ascendants et descendants le
prix du sang. Ainsi
éviterait-on de réinstituer l'office de bourreau
dont l'art, comme celui de
faire la mayonnaise ou d'éplucher les pommes de
terre, risque de se perdre, le
temps passant. Le self-service de la guillotine,
voilà qui est moderne. Nouveau !
Nouveau ! selon le langage des lessives.
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