Faisons des vers, faisons-les courts |
Bassac
PLEIN CHANT
Collection Anciennetés 1993
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Dans
Le Parnassiculet contemporain de 1872, on peut lire un
« Sonnet extrêmement
rythmique ».
Du sonnet,
la poésie respecte la structure : deux quatrains,
suivis de deux tercets. Oui, mais… quatrains et
sonnets ne comportent qu’un seul mot ; les
quatrains jouent l’un et l’autre sur deux rimes, et
les tercets pareillement, cependant sur deux autres
rimes.
Vendons la mèche. L'auteur du sonnet était Alphonse Daudet qui, avec quelques complices avait composé ce Parnassiculet contemporain pour se moquer du du Parnasse contemporain, Recueil de vers nouveaux, s.n.a., (par Catulle Mendès et Louis-Xavier de Ricard), paru par livraisons qui formèrent, chez Alphonse Lemerre, trois volumes (1866 ; 1869-1871 ; 1876). Benoît-Joseph Labre (1748-1783 à Rome), dont Alphonse Daudet ne pouvait pas savoir qu'il serait canonisé en 1881, est devenu le symbole d'un pèlerin honorant la pauvreté et plus encore l'ascétisme, mais en aucun cas l'hygiène. De tous temps il avait désiré entrer dans les ordres, mais partout il fut refusé pour sa démesure. Il vécut d'une vie errante, ayant fait vœu de ne pas se laver, pour se mortifier. Léo Taxil, après la canonisation, fit paraître dans L’Album anti-clérical (Dessins comiques de Pépin sur le texte de Léo Taxil, Librairie anti-cléricale, s.d.) une sorte de bande dessinée, Saint Labre au ciel. « Benoît-Joseph Labre, mendiant pouilleux de profession, vient d’être élevé au grade de saint par notre vieil ami Léon n° 13 » (traduire : le pape Léon XIII), écrit Léo Taxil sous la première image, représentant Labre au « Contrôle du Paradis ». « Saint Pierre est épouvanté à l’aspect de cet amas ambulant de vermine ; mais comme les papiers de Labre sont en règle, force est au céleste pipelet d’introduire le pouilleux dans le palais du père Sabaoth » (etc.) |
Gabriel Peignot, Ancien Bibliothécaire A Vesoul, avait en
son temps (« Des
vers monosyllabiques », Amusements philologiques, ou
Variétés en tout genre, par G.P. Philomneste,
A.B.A.V., Dijon, Victor Lagier, 1824, p. 130) blâmé les
vers de peu de syllabes : « ils sautillent
trop et tourmentent l’oreille par le retour trop
fréquent des mêmes consonnes ». Et il ajoutait,
accablé : « Que dirons-nous donc de ceux qui
ne sont composés que d’une syllabe ? » Bon
prince, il en donna malgré tout un exemple, citant des
vers composés chez le président Hénault (1685-1770)
par l’abbé de G…
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Commentaire
de texte de l'abbé G… :
« Je suppose (…) un personnage qui se trouve sur le
Calvaire,
au moment qu'on en descend le corps du Sauveur pour
le porter au tombeau, & qui dit à quelqu'un :
De ce lieu Dieu sort mort :
sort fort dur ! mais très sûr.
Vous
trouverez, je crois, dans ce vers Alexandrin,
douze vers d’une seule syllabe, avec un hémistiche
très-marqué, & rimant même assez
passablement… » (1).
Et voilà comment des vers, violant en apparence les règles les plus élémentaires de la versification, retrouvent, par des chemins certes capricieux, des formes traditionnelles, celles du sonnet ou de l'alexandrin, qui plus est avec un mot de poids et un arrêt à l'hémistiche. Mais que dire d'un alexandrin qui n'est pas suivi d'un second alexandrin ? Là réside le charme de l'invention poétique… On pense à Chantre (Apollinaire, Alcools) qui se compose, précisément, d'un unique alexandrin : Et l'unique cordeau des
trompettes marines
Mais aussi a-t-on
abandonné le champ des vers
monosyllabiques !
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1 - Ce commentaire se
lit dans Pièces
intéressantes et peu connues, pour servir à
l’histoire et à la littérature, par
M. D.L.P. (Pierre Antoine de La Place), Bruxelles, 1784, t. II, p. 404.
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