Ci-dessous, un passage extrait d'un article paru
dans P.T.T., 16 octobre 1936. On le lira dans
Jean Prugnot, Des voix ouvrières, pages
195-196.
Émile
Guillaumin
Le type de l'écrivain paysan
|
|
Par la simplicité de son
style, son naturel, son calme, dans la description
des faits quels qu'ils soient, Émile Guillaumin a
produit avec la Vie d'un simple une œuvre à haut
potentiel révolutionnaire, mais il ne se dévoile
pas encore là un animateur, un volontaire qui
tentera d'organiser la vie sur des bases plus
équitables. Avec le Syndicat de
Baugignoux, il
se déclare ouvertement un révolté, un homme qui
n'accepte plus l'état de choses présent, mais qui
a des idées, des projets et veut les appliquer,
veut agir. Toujours humain, précis,
remarquablement vrai, Guillaumin, coopérateur et
syndicaliste, montre dans le Syndicat
de Baugignoux,
les luttes de Marcel Salembier contre les gros
propriétaires terriens, les victoires, également
les difficultés dues à la méfiance et à l'inertie
des paysans vis-à-vis de l'idée syndicaliste.
Livre de combat s'il en est un, où, dit Léon Gerbe
« le récit s'élève à l'épopée par la seule
force généreuse du héros se battant seul contre
toutes les forces liguées de la campagne :
celle des oppresseurs et celles nées de
l'ignorance et de la routine ».
Du jour où parut le
Syndicat de Baugignoux du jour où
s'affirmèrent les idées révolutionnaires et
l'action constructive, libératrice de Guillaumin,
la critique fit le silence autour du paysan
d'Ygrande… Un péquenot qui se mêlait d'autre chose
que de monder ses vaches et faucher sa luzerne,
qui se permettait de trouver que tout n'était pas
pour le mieux dans le meilleur des mondes !
C'était en vérité un peu fort ; on le lui fit
bien voir. Ceux qui l'avaient porté aux nues le
renièrent et l'abandonnèrent froidement. Éternelle
histoire… « En politique, tout est permis,
sauf l'honnêteté, écrit Poulaille dans son Nouvel
âge littéraire,
le dédain qu'affichent pour lui ceux qui le
prônèrent jadis, le prouve, mais comme il n'est
que de l'honnêteté morale que se satisfasse le
cœur de l'homme simple, Guillaumin est à ce point
de vue moins à plaindre que ces faux bonshommes,
lesquels ne doivent pas songer à lui sans un
certain mépris pour eux-mêmes. »
Les « officiels »
prouvent une fois de plus qu'ils ne sont que les
domestiques d'une classe. Les livres qu'a donnés par
la suite Émile Guillaumin : Notes paysannes
et villageoises (1925), À
tous vents sur la glèbe (1931) ont été ignorés
d'eux.
C'est donc à nous,
syndicalistes révolutionnaires, qu'il importe de
faire connaître Émile Guillaumin.
Aujourd'hui, toujours à
Ygrande, l'auteur de la Vie d'un Simple continue de cultiver la
terre, il prend la plume à ses moments perdus pour
écrire un article, une préface, une chronique de
la vie paysanne, une « lettre de la
campagne » pour le Peuple.
|