Cette fable, publiée en 1678, fut
écrite à la suite d'un accident qui s'était produit en
février 1672, lors des funérailles de François
de Boufflers, le frère aîné du maréchal. Le carrosse
qui transportait le cercueil, à côté duquel était
assis le curé du maréchal, s'était renversé, si bien
que le cercueil avait coupé le cou du curé.
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n mort s'en alloit tristement S'emparer de son dernier giste ; Un Curé s'en alloit gayment Enterrer ce mort au plus viste. |
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Nostre défunt estoit en
carosse porté, Bien et deûment empaqueté, Et vestu d'une robe, helas ! qu'on nomme biere, Robe d'hyver, robe d'esté, Que les morts ne dépoüillent guere. Le Pasteur estoit à costé, Et recitoit à l'ordinaire Maintes devotes oraisons, Et des pseaumes et des leçons, Et des versets et des réponds : Monsieur le Mort laissez-nous faire, On vous en donnera de toutes les façons ; Il ne s'agit que du salaire. Messire Jean Choüart couvoit des yeux son mort, Comme si l'on eût deu lui ravir ce tresor, Et des regards sembloit luy dire : Monsieur le Mort j'auray de vous Tant en argent, et tant en cire, Et tant en autres menus cousts. Il fondoit là dessus l'achat d'une feuillette Du meilleur vin des environs ; Certaine niece assez propette Et sa chambriere Pâquette Devoient avoir des cottillons. Sur cette agreable pensée Un heurt survient, adieu le char. Voila Messire Jean Choüart Qui du choc de son mort a la teste cassée : Le Paroissien en plomb entraîne son Pasteur ; Nostre Curé suit son Seigneur ; Tous deux s'en vont de compagnie. Proprement toute nostre vie Est le curé Choüart, qui sur son mort comptoit, Et la fable du Pot au lait. |