Éditions PLEIN CHANT     
Apostilles


En souvenir de Michel Ohl alias Narcisse Boudigans


Michel    O H L

Extrait de  L'enterrement qui frétillait de la queue

achevé d'imprimer en octobre 1994 sur les presses de Plein Chant à Bassac





L'ENTERREMENT QUI FRÉTILLAIT DE LA QUEUE


Schéol



Pages 15-17, Onessa 2
Schéol : le séjour des morts, pour les Hébreux, autrefois, mais à lire ici : Chez Ohl. Aux éditions Finitude, Michel Ohl a publié Premier souvenir dernier écrit (2001),  collection "Les bricohles".




Publié avec le concours des Almanachs Cadavermot
  



Le jour de l'enterrement il s'est mis en signe de deuil à neiger du caca.
Signe de deuil mon œil ! lança Fuzèche. Il pensait, lui, que des oiseaux s'étaient oubliés dans les nuages. Latapy appelait le Bureau climatologique.

Incinérez-moi, je vous en prie.
Et puis, soyez gentils, jetez mes cendres à la
Garonne...


avais-je écrit peu avant de mourir sur une feuille, repliée ensuite en forme d'avion. Ils cherchaient, la mort dans l'âme, le numéro du crématorium, lorsqu'une voix fit observer que je personnifiais volontiers les objets, que je leur donnais volontiers la parole aux objets, aux choses, aux matériaux, meubles, couteaux, cartons, lunettes fumées, planeurs, cailloux, poignées de sable, que je l'avais donnée, la parole, en l'occurrence, à une feuille de papier, elle nous suppliait de l'incinérer, il fallait s'incliner, en mémoire de moi, inclinons-nous, fit la voix. 
   


Et vous l'imaginez, vous, ajouta Cazade, vous l'imaginez voltigeant au-dessus du fleuve ? Et d'ailleurs ça n'est pas son écriture, c'est une écriture de papier à lettres aériennes. Et l'on chargea Niécette d'incinérer la feuille. Au fond de l'étagère du bas du placard de la souillarde, près des élastiques de diverses tailles servant à tenir clos les paquets de biscuits entamés, il y avait une collection de sachets de cellophane destinés aux crottes du chat. L'un d'eux eût très bien pu recueillir les cendres de la feuille aux dernières volontés mais comment Niécette eût-elle connu l'existence et a fortiori l'emplacement des dits sachets la pauvre innocente ? Elle se contenta de recouvrir le cendrier d'une assiette à dessert en carton où elle écrivit soigneusement Penser à jeter Garonne et huit baisers d'adieu plus tard on vissa le cercueil, ça m'apprendrait à écrire.





Le convoi prit donc le chemin d'Onessa. De mon vivant, l'idée d'y être enterré me glaçait le sang. J'y trouvais la preuve qu'entre la naissance et la mort il ne se passait rien du tout. J'avais tenté d'y couper, au caveau de famille, mais on a vu le beau succès. Il faisait froid, assez mais pas trop. Un temps de neige. […]







Accueil | Apostilles | Tombeau de Michel Ohl