À la fin de cette année, au début de l’année suivante, vous allez boire du vin et parmi les vins, les meilleurs. Si un écolo se trouve parmi vous, voici une histoire d’O — une autre — qui le ravira, « Un repas en 1900 ».
Dans ce court dialogue, recueilli dans Monsieur
veut rire, par Alfred Capus (Paris, Paul
Ollendorff,
1893),
s'il est question d'eau, on constate qu'une lecture
faite en 2012,
diffère de la lecture des contemporains du
texte. Monsieur veut rire parut en 1893 ;
les nouvelles avaient sans doute étaient prépubliées
dans la presse, mais en quelle année ? Peu
importe, car en 1893 encore, le « Repas
en 1900 »
apparaissait une anticipation ; et pour rendre
le texte drôle et surprenant, il fallait inventer un
événement invraisemblable en théorie, dont la seule
évocation ferait les lecteurs s'esclaffer. Payer
l’eau plus cher que les grands crus !
Hiérarchiser l’eau de la source ou de la
fontaine comme on classe les vins !
Stocker l'eau, alors qu'il suffit d'aller en
chercher à la fontaine, au puits, ou de s’en faire
livrer jour après jour ! L’eau
devenue de l'or liquide ! Et
ce futur qui n’est plus à venir, rendu
présent par la grâce du langage, acquiert
une force plus grande encore, venue de la
date presque mythique 1900 :
un nouveau siècle, l’an mil répété !
Il fallait un changement incroyable dans
les façons de vivre, et quoi de plus
inattendu sinon d’absurde que le vin ayant
cédé sa place à l’eau ?
Eh ! bien,
depuis quelques années nous entendons dire que
l’eau se raréfie, et un écoleau rirait
à peine de l’histoire d’Alfred Capus. En
2012-2013, les sentiments inspirés
par le texte d’Alfred Capus changent dans la mesure
où, toute fiction abolie, l’eau est vraiment en
train de devenir rare ;
là, plus question de rire. Reste un rire
rétrospectif, un rire plutôt jaune, devant ces
inconscients du dix-neuvième siècle incapable
d'imaginer le probable (?) changement de statut de
l'eau. On nous dira que le vin se
fabrique avec de l’eau, que lui aussi va devenir une
rareté absolue et que les amateurs de vin sont
autant concernés que les buveurs d’eau. Ce serait le
thème d'une autre historiette… Voir : |